Le témoignage de Gwendoline : 5 années de combat, 1 IAC, 4 FIV, 12 TEC, une petite fille des étoiles et un fils pour décembre
Je suis Gwendoline, une jeune femme de 25 ans et voilà bientôt 8 ans, que je partage mon quotidien avec Jérôme, 35 ans.
Nous habitons une petite ville d’Ille et Vilaine en Bretagne. Nous avons acheté une petite maison que nous rénovons depuis janvier 2015 et essayons, depuis 5 années, de fonder notre famille.
J’arrête ma contraception en mai 2016, avec le cœur rempli d’espoir
8 années de pilule et de nombreux dérèglements hormonaux nous laissaient présager une certaine attente tout de même.
Mais nous étions confiants. 6 mois, 1 an ça n’était rien. Nous étions persuadés que nous y arriverions.
Je mets toutes les chances de mon côté et consulte une sage-femme pour un bilan pré conceptionnel. Je consulte également un dentiste et mon médecin traitant. Tous les voyants sont au vert, nous essayons naturellement d’avoir un enfant.
J’ai réussi à patienter 3 mois. 3 mois c’était le temps où j’ai laissé faire Dame-Nature.
Les annonces de grossesses commençaient à pleuvoir, j’étais désormais décidée à faire venir ce bébé un peu plus « vite ». J’ai commencé à cibler les jours propices en me fiant à mon corps et ses symptômes, mais ça ne donnait rien. Depuis le mois d’août mes cycles étaient devenus plus longs, en moyenne 31 jours contre 28 pour un cycle dit « normal ». D’ailleurs cette modification soudaine nous avait laissé penser à une grossesse lorsque le matin du 29e jour, les règles ne s’étaient pas pointées. Ce fut la première déception d’une longue liste d’échecs…
Les méthodes naturelles ne fonctionnaient pas, j’avais beau calculer les jours de fécondité, le résultat à la fin du mois est toujours le même. Les mois passent, et je me sentais incapable d’y arriver.
Et puis il y a eu cet évènement, ce truc que toutes les femmes ont l’impression d’avoir déjà vécu sans en être sûres.
J’obtiens mon premier retard de règle en décembre 2016
Les règles n’arrivent pas. 1 semaine, 2 semaines de retard. J’ai peur, je ne teste pas. Je ne veux pas avoir ce test devant les yeux, le digital, celui qui est violent, celui qui ne te ménage pas. Celui qui annonce en toute lettre « PAS ENCEINTE ». J’achète un test classique avec les petites barres, il est moins cruel, 2 semaines c’est beaucoup, je n’ai jamais eu autant de retard. Je commence à y croire. Nous sommes en fin d’après-midi, je testerai demain matin.
La nuit passe, je ne trouve pas le sommeil. J’ai l’impression d’être une petite fille, une veille de rentrée. Il est 5 h et je sens quelque chose couler entre mes jambes. Je me lève et je me rue dans la salle de bain. Je sors le test de son emballage, je comprends que c’est terminé, le sang coule, il est rouge. J’ai mal au ventre. Mais je veux être sûre de ne pas être folle. Je fais pipi dans un petit pot, je trempe le test et le laisse pour pouvoir me nettoyer sous la douche.
Je sors de la douche, je regarde le test… Il semble négatif. Je le démonte, je sors la tige et le regarde à la lumière. Là ! Je vois quelque chose. Je ne te dis rien, j’attends l’après-midi pour te le montrer. Au soleil on verra mieux.
Mon mari ne voit rien, il me dit de le jeter et me demandes si j’ai mes règles.
– Oui.
– Alors tant pis.
Dans les toilettes, ça n’est pas comme d’habitude. Il y en a beaucoup du sang. Et ça sera comme ça pendant 15 jours. Je pense avoir fait une fausse couche. Mais je n’ai aucun moyen de le vérifier. J’essaye de trouver du réconfort sur les forums « doctissimo, auféminin, wemoms… ».
Les forums seront durant cette période une véritable bouée de secours. Sur le moment, ils m’aident à trouver des réponses à mes questions. J’échange avec des femmes qui, comme moi, essayent de faire un bébé depuis plusieurs mois. Les termes deviennent plus « techniques » et très ridicules entre nous… Mais c’est la norme ! Tout le monde les emplois. Je ne ferais pas l’exception, il faut bien se fondre dans la masse.
« Zozo » pour spermatozoïdes
« Zhom » pour nommer son chéri
« TP » (Travaux Pratiques) pour les câlins
« C1 C2 C3 C4 »… Cycle 1 2 3 4
« TG » Test de Grossesse
« TO » Test Ovulation
Et j’en passe…
C’est en parcourant ces sites, que j’entends parler des tests d’ovulation. Ils permettraient de ne pas se tromper sur la période fertile. J’en achète par lots de 10 dans un magasin discount et me rassure. Avec ça, bébé viendra, j’en suis sûre.
Ces femmes sur les réseaux sociaux finissent par tomber enceintes, les liloo532 ou alixbb1, toutes celles que je suis et encourage, finissent par y arriver. J’en vois arriver d’autres, puis elles aussi tombent enceintes, et ça recommence… Les mois passent et je pleure, seule, dans mon oreiller le soir. Mon mari se sent fatigué, se sent « homme objet ».
Les mois passent, 1 an vient de s’être écoulé. Je reprends rdv chez ma sage femme, l’on s’y rend pour des conseils et démarrer éventuellement un diagnostic. Un an s’était passé et toujours pas de bébé, nous voulions comprendre pourquoi. « Ras, vous êtes jeunes, tout ira bien ». Après avoir insisté, un spermogramme est prescrit à mon mari, la sage-femme nous avoue être peu compétente dans le domaine de la procréation assistée, ne révèle rien de particulier et nous propose de revenir dans 1 an.
Ma famille nous conseille d’aller chez un gynécologue spécialisé en infertilité
Je passe un bilan hormonal et sérologique chez Dr F. Il me diagnostique un SOPK (syndrome des ovaires polykystiques). A ce stade, j’avais peu de symptômes, à part des cycles longs, je ne connaissais pas cette maladie. Mon conjoint doit faire un 2e spermogramme. Grande surprise, ce médecin nous explique que mon mari va très bien. RAS de son côté.
On nous dirige donc vers du Clomid, une stimulation ovarienne simple par comprimé avec rapports programmés.
S’en suivra 6 mois de stimulation, éprouvants, fatigants où le mental est mis à mal.
6 mois d’essais infructueux, on nous propose de passer au « Gonal F ». De la stimulation ovarienne par injections sous cutanée. Ce médecin est peu à l’écoute, concentre ses efforts sur moi alors que j’ovule visiblement seule et correctement. Chaque stimulation ovarienne, simple ou par injection, s’accompagnaient d’échographies vaginales et de prises de sang tous les deux jours autour des période fertiles. Tout cela à 1h de notre domicile. Ce médecin n’écoute pas, Je l’entends encore nous dire « la PMA pour vous, c’est du luxe ». C’est la goutte de trop. Nous réclamons un autre spécialiste !
Le rdv à la PMA de la Clinique la Sagesse à Rennes est pris.
Le moral est en berne. Les annonces de grossesse pleuvent de tous les côtés. Je suis affaiblie. Je m’isole.
On « s’in-sociabilise ». La PMA c’est 3 mois d’attente. Alors le gynécologue en qui nous n’avons plus confiance nous propose de passer aux inséminations « en attendant ».
C’est parti pour un 3e spermogramme. Je reste au GONAL F car je réagis plutôt bien au produit. 3 semaines d’injection. Mon corps est long à la détente. L’avant-veille de l’insémination, 2 étapes restantes : l’ultime injection d’OVITRELLE nous permettant de déclencher l’ovulation, et passer un coup de fil au laboratoire de Vannes qui se trouve à ¾ d’heure du cabinet de notre gynécologue pour les prévenir de notre arrivée.
Je suis stimulée, déclenchée, et le laboratoire nous informe que notre gynécologue n’a pas fait les démarches administratives obligatoires, ne nous a pas prescrit toutes les sérologies nécessaires. Et par-dessus le marché, nous n’avons pas effectué le rdv obligatoire avec le biologiste. L’insémination est ANNULÉE.
Dr F. nous lance sur une 2ème insémination. Cette fois-ci je prends les choses en main. Je fais un dossier béton. Je contacte le labo, j’organise les rendez-vous, les sérologies, l’entretien obligatoire, et toutes les démarches administratives. Le cycle suivant, l’insémination est programmée. On se sent tout de même seuls dans ce protocole, notre gynécologue nous donne son numéro de portable mais il ne répond jamais.
Mon mari effectue son prélèvement au laboratoire, nous attendons 2h de préparation de l’échantillon sur le parking, puis on me le donne en nous indiquant de nous rendre au cabinet de notre gynécologue pour l’insémination. L’échantillon de mon mari sur mes genoux dans la voiture, nous avons pris la route jusqu’au cabinet. J’ai l’impression de « voler » le laboratoire, sensation vraiment étrange. Je me promets à ce moment là, de ne plus avoir à vivre ça. Les prochains essais seront encadrés, accompagnés, bref une vraie PMA, hors de question de me balader à nouveau avec notre futur bébé dans mon sac à main !
L’insémination est douloureuse. Il est obligé d’utiliser des pinces de Pozzi pour ouvrir mon col. Ça dure une éternité. Je saignerais toute l’après-midi, avec des contractions utérines importantes.
Nous sommes en juin 2018.
L’entrée en PMA
Nous avons enfin rendez-vous avec notre nouveau gynécologue, Dr J. de la clinique de la Sagesse à Rennes. Nous sentons directement son professionnalisme. Elle sait véritablement de quoi elle parle. Nous lui racontons notre histoire qu’elle s’empresse de taper frénétiquement sur son ordinateur. Notre récit terminé, elle pose son crayon. Nous regarde, et nous dit le plus simplement possible :
« Il s’agit d’une infertilité masculine. Nous sommes là face un OATS- oligoasthénotératospermie sévère. Madame, vous avez un SOPK mais vous réagissez bien au traitement, je préconise une FIV avec micro injection, c’est ce qu’on appelle une FIV ICSI. Voici votre ordonnance. Vous devrez repasser un bilan hormonal et sérologique. Monsieur, vous n’aurez pas à refaire de spermogramme, ils datent tous de moins d’un an. »
Je sors du rendez-vous avec les réponses à mes questions.
Les choses s’organisent vite. Nous sommes en juillet 2018 et mon bilan hormonal effectué pour la deuxième fois, la gynécologue m’annonce que j’ai des « adhérences et des épanchements dans le cul de sac de Douglas » à surveiller. Les douleurs, les règles pendent 3 semaines, les kystes, depuis mes 10 ans, je me doutais un peu qu’il y avait quelque chose de pas normal. Mais je n’étais jamais tombé sur un médecin à l’écoute. Elle m’informe que cela s’appelle « endométriose » et que c’est l’une des premières causes de l’infertilité chez la femme.
Je m’empresse de m’inscrire sur des forums et des sites plus spécialisés dans la PMA, notamment « FIV.FR » qui devient ma principale source d’informations et de soutien. Je rencontre des femmes qui passent par les FIV, les ponctions, les PMA avec donneurs. Je découvre un monde qui m’était inconnu jusque-là. Pour la première fois, je ne me sens plus seule.
Nous sommes en septembre 2018.
Nous commençons le traitement pour notre première FIV
Nous étions très investit et véritablement pleins d’espoirs ! La stimulation (toujours sous injection GONAL F) se passait bien, les contrôles échographiques pour l’évolution des follicules aussi. Le jour de la ponction est arrivé, sous anesthésie générale ! Résultats de cette première FIV, 9 ovocytes recueillis, et 5 embryons obtenus ! 1 embryon m’a été transféré en frais, 4 embryons furent congelés. S’en suivra pour nous, 2 autres transferts d’embryons congelés avec toujours la même déception, le même « négatif » qui nous broie le cœur à la fin du mois. Nous étions en décembre 2018.
Début février 2019 et dans l’attente du résultat d’un énième transfert d’embryon. Un matin, j’ai ressenti une vive douleur dans le bas du ventre, je saigne légèrement. Je comprends donc que ce transfert est un nouvel échec et que je n’irais pas été faire ma prise de sang. Trop dur pour moi de voir ce « négatif » en toutes lettres. J’ai continué à perdre du sang tantôt rose tantôt rouge pendant 3 jours. Jusqu’à ce que la PMA m’appelle étonnés de ne pas avoir mes résultats. Je leur ai dit vouloir faire une pause. Je voulais tout arrêter. Mais pour clôturer cette tentative, il était obligatoire, dans le protocole, d’effectuer la prise de sang. Je devais faire ce test de grossesse. Je me suis exécutée. Et le résultat était sans appel : « 800ui ». J’étais enceinte. C’était irréel… Je n’y croyais pas. Positif… Le 1er en 2 ans et demi d’essai. Tout s’est enchaîné très vite, le contrôle à 48h, 1900ui, montrait une grossesse évolutive. Alors on s’est empressés de partager la bonne nouvelle à nos parents. Trois semaines plus tard alors que j’étais au restaurant en train d’annoncer ma grossesse à une amie, de violentes douleurs et de gros saignements m’ont forcé à rentrer à la maison. J’ai appelé la maternité qui m’a prescrit une nouvelle prise de sang. Le couperet tombe, « 500ui », le taux d’HCG venait de chuter, ce qui voulait dire que je faisais une fausse couche. Je perds l’embryon 2 jours plus tard dans la douche après 30 minutes de contractions. Je passe à l’échographie quelques jours plus tard, mon utérus était vide. J’étais vide. Nous étions à nouveau à la case départ. Dévastés par le chagrin et un sentiment d’injustice. Nous devions le « dès »-annoncer à tous le monde : J’ai fais une fausse couche, j’étais à 2 mois. Je suis déconnectée de la réalité, je ne mange plus, je dors peu et je reprends le travail quelques jours après.
Nous taisons « évidemment » cet évènement à tout ceux qui n’étaient pas au courant de ma grossesse. Et comprenons la tradition qui veut attendre les 3 mois avant d’annoncer la nouvelle.
Un retour de couche au bout de 6 semaines et nous transférons le dernier embryon en mai 2019. Négatif.
Nous repartons pour une 2e FIV en juillet 2019
La ponction est moins fructueuse, 6 ovocytes prélevés, 1 seul embryon obtenu… Nous avons peu d’espoir et sommes même inquiets, car en France, un couple infertile peut bénéficier de 4 FIV remboursées par la CPAM.
Et pourtant… Je tombe enceinte. Ma prise de sang est positive. Nous n’y croyons pas. Les fausses couches maintenant nous en avons saisi « les risques ». Je passe doucement les premières semaines de grossesse, nous sommes angoissés. Je suis arrêtée au travail car je commence à avoir des saignements. L’échographie arrive, tout va bien la grossesse est évolutive. L’échographie du premier trimestre se passe bien également, un beau petit bébé avec tout ce qu’il faut là où il faut. L’annonce aux familles est donc de rigueur. Et nous sommes tous très heureux. Je commence à me détendre, à profiter. Mon ventre s’arrondit. J’achète quelques effets. Une 5ème échographie nous montre un grand bébé aux mensurations de rêve. Nous entamons les travaux dans la maison. Je continue de me reposer. La maternité est choisie, un accouchement naturel en salle nature, à la clinique de la Sagesse de Rennes avec les sages femmes physio de l’unité « parent’heiz » est programmé. Les tests de trisomie sont bons, bref tout va bien. Mon entretien du cinquième mois arrivant à grand pas, je suis vraiment rassurée. Et puis vers les fêtes de fin d’années, je commence à me sentir plus fatiguée qu’à l’accoutumée. Je perds énormément de sang entre noël et le jour de l’an. Ce qui va me pousser à consulter en urgence, tous les jours, à la maternité de ma ville (la clinique de Rennes étant à une heure de route).
On me laissera dans un box pendant 3h aux urgences avec du paracétamol, le cœur du bébé bat, tout va bien, « rentrez chez vous ». Je retournerai chaque jour qui suivirent dans cette même maternité, on me servira le même discours. Mon col se raccourcit à chaque échographie mais pas d’hospitalisation, pas de cerclage. Rien. « Rentrez chez vous ». Je consulte le 28/12, le 29/12, le 01/01, le 02/01, malgré un hématome visible à l’échographe, un décollement et un col raccourcit, une mise au repos simple m’est préconisée. Une sage-femme souhaite me donner un traitement pour me « détendre car je suis stressée pour rien » selon elle. Elle me prescrit du Spasfon. Je m’alite moi-même. Je ne bouge plus. Et puis le 3 janvier 2020, dans mon canapé, je perds les eaux. Je comprends que c’est fini. Il est trop tôt pour le bébé, sans liquide amniotique, il ne survivra pas. Je vais à nouveau aux urgences. Le col est court, 5mm. Je vais accoucher. J’hurle, je crie, mon mari est dépassé, il pleure tellement. C’est une scène irréelle. Le gynécologue est d’une violence sans nom. Ne prenant pas le temps de nous expliquer, parle à son assistante « installez la péridurale, montez-là et installez là pour l’accouchement », la sonde vaginale encore en place. Alors je tente de comprendre ce qu’il m’arrive, j’étais sur cette table hier encore, et on m’a dit de rentrer chez moi !! Il m’hurle qu’il n’y est pour rien et que « vous voyez bien là devant vous, votre bébé est en train de mourir ». Je réalise ce qu’il se passe. C’était trop tard. Mon bébé n’avait plus de liquide et je commençais à avoir les symptômes d’une infection.
C’est d’une violence sans nom. Je ne pense pas avoir déjà autant souffert qu’à ce moment précis. Le moment où j’ai compris que c’était fini. Là, maintenant, alors qu’elle est encore en vie. Son cœur battait la chamade, comme me suppliant de la sauver. C’est injuste, c’est presque incompréhensible.
De cette nuit-là, il ne me reste pas grand-chose, juste la douleur du cœur. Je m’en souviendrais sûrement toute ma vie. La sensation qu’on vous arrache le cœur à main nue. Qu’on le jette dans le fossé, qu’on le piétine, et puis qu’on vous le recolle dans la poitrine avec du scotch parce que « on a besoin de vous, il va falloir accoucher ». Je n’avais qu’une envie, c’était m’éteindre, mourir avec mon bébé. Qu’on me mette sur « off », je voulais fermer les yeux… Ne plus les ouvrir. La sentir bouger, c’était elle et moi, rien d’autre…
Et puis une force dont je ne soupçonnais pas l’existence m’a prise par la main, j’ai accouché, un après-midi de janvier, sans péridurale, d’une petite fille. Elle était minuscule mais qu’est-ce qu’elle était belle… J’étais dans ma 19e semaine de grossesse. Elle s’appelle Calesse et repose au cimetière de l’EST à Rennes. Une fausse couche tardive suite à une chorioamniotite.
Deux mois plus tard, le deuil encore à vif, on me propose une hystéroscopie afin de comprendre ce qu’il s’est passé. J’accepte sans hésiter, mais le COVID viendra s’y mêler, 2 jours avant l’intervention, la clinique m’appelle « vous ne faites pas partie des opérations urgentes ou importantes, votre hystéroscopie est reportée sans que nous puissions vous donner une date de report pour le moment ». En échange, on me prescrit une échographie poussée, qui confirmera une endométriose avancée, des polypes et une adénomyose installée.
Après presque 5 ans d’essais pour avoir un enfant, nous commencions doucement le deuil d’un enfant naturel, et pensions à l’adoption. Le 26 septembre dernier nous nous sommes mariés, dans cette démarche, afin que nous puissions un jour adopter, si nous nous sentions prêts.
Nous continuons, avec une 3e FIV en août 2020
Elle nous a permis d’obtenir 21 ovocytes, 5 embryons. 5 échecs. Des examens plus poussés étaient nécessaires. Il semblerait que mon système immunitaire « attaque » notre bébé́ à chaque fois que je tombe enceinte. Il rejette la grossesse et le traite comme un « inconnu ». Notre médecin nous a orienté vers une biopsie de l’utérus. La “Matrice Lab” nous a permis de renseigner sur la présence et l’activité́ de mes cellules immunitaires. En effet les résultats montrent un profil immunitaire mixte avec un déséquilibre pro inflammatoire de mon endomètre. Il semblerait donc que cela soit la raison des saignements et de mon accouchement bien trop prématuré. Nous sommes en février 2021, mon hystéroscopie est enfin prévue, un an après sa déprogrammation. On m’enlève les polypes, on me prélève de quoi écarter la présence d’une infection chronique ou d’une endométrite, et la chirurgienne en profite pour faire un curetage « doux » de la cavité.
L’heure de la 4e FIV est arrivée
J’angoisse un peu, j’y crois beaucoup ! Tous les examens se sont bien passés, biopsie qui a bien trouvé un déséquilibre pro inflammatoire de mon endomètre, je suis un profil « mixte » autrement dit, on stimule mais pas trop. Je suis sous corticoïdes pour pallier à ce problème. Ma gynécologue suit les indications du laboratoire et effectue un scratching le cycle précédent notre tentative.
Pour cette FIV, c’est un vrai traitement de cheval, je suis obligée de faire un calendrier et remplir un pilulier entier. PROVAMES, PREDNISONE, TOCO, CHOLECALCIFEROL, OVUNOL, FYREMADEL GONAL F, OVITRELLE (ou DECAPEPTYL si hyperstimulation, j’espérais ne pas l’utiliser celui-là) … Et de la progestérone, PROGESTAN en veux-tu, en voilà !
Mes règles sont arrivées et je commence mon traitement. J’appelle le centre PMA pour connaître mon écho de désensibilisation et mon premier jour de stimulation. Les monitorages commencent et ils révèlent un trop grand nombre de follicules, 27 pour être exact. Ce qui veut dire chez moi, des ovocytes généralement de mauvaise qualité et une hyperstimulation en bout de piste. La gynéco est formelle : si plus de 20 ovocytes à la ponction, il n’y aura pas de transfert frais.
Les jours passent et finalement les derniers monitorages ne sont pas si catastrophiques : 17 follicules matures. Un déclenchement au DECAPEPTYL est tout de même préconisé mais le transfert frais est toujours possible, il suffira de faire une injection d’OVITRELLE après la ponction. Soulagement à la sortie du bloc, nous avons obtenu 10 ovocytes.
L’infirmière m’a donc fait une injection d’OVITRELLE et j’ai continué le protocole Matrice Lab scrupuleusement. J’ai un peu de mal à me remettre de cette ponction, je dors très mal depuis l’intervention. Je me dis que je dois être douillette. Et pourtant, j’ai le ventre gonflé, une véritable gêne la nuit, impossible de rester trop debout, trop assise, je reste au lit la plupart du temps. C’est la première fois en 4 FIV.
Le biologiste nous appelle, nous avons 4 embryons ! Le transfert de 2 embryons est donc programmé pour le lendemain… Nous essayons de garder les pieds sur terre mais l’envie d’y croire est très très forte. Je continue mon traitement avec beaucoup de ferveur. J’ai des clics d’OVITRELLE, de la progestérone à gogo, des corticoïdes, des œstrogènes, des vitamines… Mon pilulier déborde.
Mais quelques jours après le transfert, mon ventre s’est mis à gonfler comme un ballon de baudruche, j’ai mal, ça me tire, je dors peu. Je reste allongée, la douleur est intense mais les Dolipranes soulagent. Je me lève pour aller aux toilettes. Un malaise soudain me fait m’effondrer. Mon mari appelle la clinique, je vais mieux et reprend mes esprits mais je commence rapidement à avoir du mal à respirer.
Nous décidons donc d’aller aux urgences. Mes ovaires font quasi 10 cms, et j’ai du liquide dans l’abdomen. Un repos simple est préconisé.
Une hyperstimulation sévère
Deux jours plus tard, à nouveau un malaise, je ne plus m’asseoir, je m’effondre dans la salle de bain, une douleur atroce dans l’abdomen. Je suis transportée d’urgence à la clinique. Je suis mise sous oxygène et morphine. 4 kilos d’ascite dans le ventre.
Je resterai une semaine hospitalisée. Mon corps n’a pas du tout géré cette dernière FIV.
Mais le gynéco m’indique qu’il vient d’avancer ma prise de sang bêta HCG. C’est ce jour que je saurai si tous ces efforts n’étaient pas vains. Mon cœur palpite en le voyant pénétrer dans ma chambre.
Résultats : « négatif. Sortie anticipée, rentrez chez vous ».
Mon cœur ne palpite plus. Il s’est arrêté. J’ai envie de pleurer, les mots de sortent pas.
J’attends mon mari, il me récupère en fin de journée. Lui est particulièrement heureux de me retrouver, le négatif ? Finalement une broutille face à la peur qu’il a eue durant toute cette semaine d’hospitalisation. Je regarde dans le vide, je laisse défiler le paysage breton dans cette petite voiture qui me rappelle que nous n’y sommes plus 4, mais 2. Si une grossesse s’était installée, le syndrome aurait perduré. Mon corps devait guérir doucement. Avec des bas de contention… Et des injections d’anticoagulants.
Les conseils de nos gynécologues sont précieux et le risque d’HSO est sérieux. Parfois un report est nécessaire, il faut l’accepter…
L’ultime transfert d’embryons
Nous avons enchaîné notre dernier transfert d’embryons le mois qui a suivi mon hyperstimulation. Je n’y croyais pas, mon mari non plus. On l’a fait « pour s’en débarrasser ». Clôturer cette FIV. Ce combat, on l’avait évoqué, devait arriver à son terme. Car mon cœur et mon corps n’y arrivaient plus. Nous devions faire une pause après cet ultime transfert, voir un deuil de la parentalité.
J’ai enchaîné ce transfert et attendu les 15 jours sans y croire. La veille du résultat, sur notre terrasse, au soleil couchant, mon mari dans l’embrasure de la porte, j’en étais arrivée à un constat : Je n’ai besoin de rien d’autre. Nous n’avons plus de prise en charge CPAM, plus d’embryons, plus de FIV possible en France. On discute énormément ce soir-là, on doit partir prochainement à l’étranger, on tente d’organiser nos agendas, on rit, on rêve, on se voit loin du quotidien et on se le promet, lorsqu’on rentrera, on adoptera deux gros bouviers bernois.
Ça y est, nous sommes au bout du combat, nous n’aurons pas d’autre enfant. Calesse est notre premier et sera notre unique enfant. Et c’est ok. Nous sommes sereins. Après autant d’années de combat, et de souffrance, nous acceptons.
Et puis le choc.
Résultats : 740 UI, positif
Après un début de grossesse compliquée, un hématome un alitement strict, un cerclage refusé, un contrôle du col toutes les semaines au CHU de Rennes et une équipe, oh combien bienveillante, nous commençons à y croire… Je suis aujourd’hui enceinte de 6 mois et nous attendons un petit garçon pour décembre 2021…
Depuis plus de 5 années nous mettons notre énergie, nos cœurs, nos espoirs et notre vie entre parenthèse pour aboutir à ce projet. Projet, qui semble à la portée de n’importe quel couple, était devenu combat pour nous.
Nous continuons ce combat. Contre l’infertilité, contre les tabous tissés autour de la PMA, des fausses couches et du deuil périnatal.
Merci pour votre attention et votre lecture.
Jérôme et Gwendoline
Votre histoire ma profondément touché étant passé par la PMA et étant dedans encore. Mon parcours n’a rien à voir avec le votre et je m’estime chanceuse, mais votre histoire est bouleversante, touchante. Merci d’avoir partagé ces moments, epreuves et espoirs. Que du bonheur à vous